logofb

 

 
 
line decor
Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale ( France ) - www.aassdn.org -  
line decor
 

 


 
 
 

 
 
PAGES D'HISTOIRE & " Sacrée vérité " - (sommaire)
LA GARDE SOUS VICHY - L’ASSASSINAT DU LIEUTENANT-COLONEL ROBELIN PAR LES S.S. EN JUILLET - AOÛT 1944
 

Ce texte est une synthèse des pages 147 à 185 de l'ouvrage du Colonel Claude CAZALS, paru en juin 1997:  

... En dehors du refus courageux ou de l'abandon militant au régime de Vichy qui furent l'un et l'autre le fait d'une minorité, il y eut dans une vision plus détaillée, dans le quotidien, toute une palette d'accommodements qu'il importe de préciser et de définir au plus près. (François Bloch-Lainé et Claude Gruson).

Certains auteurs considèrent que " le retournement contre l'ennemi au moment opportun et dans les meilleures conditions de réussite " aurait pu être conçu au niveau du commandement supérieur de la gendarmerie, pour ne citer que ce corps constitué de l'appareil policier.

Cas unique parmi les corps des forces de l'ordre, dès 1943, le chef d'escadron Robelin, sous-directeur technique de la Garde, prépare son ralliement à la Résistance.

Sur proposition du Général Verneau, le chef d'escadron Robelin accepte son idée d'entraîner la Garde dans la Résistance.

Dans la garde, le Maréchal Pétain ne fait pas l'unanimité : les avis sont partagés parmi les officiers. Quant au Général Perré, il attend de la Garde de l'efficacité et du loyalisme à l'égard du régime en place. Le chef d'escadron Robelin (Duphin) a choisi de prendre ses distances à son égard, et de jouer double jeu, avec tous les risques que cela comporte.

Dans le cadre de ses fonctions, il agit de trois manières : - il poursuit son aide aux Services Spéciaux, renseignant le contre-espionnage clandestin à la tête duquel se trouve le Lieutenant-Colonel Lafont (Verneuil) ;

- de mai 1943 à juillet 1944, il prend les dispositions nécessaires pour faire preuve d'obstruction systématique aux ordres d'opérations émanant du secrétaire général au maintien de l'ordre ;

- il prépare le passage de la Garde au maquis. Le chef d'escadron Robelin repère un " correspondant " de confiance dans chaque régiment. Des contacts sont entretenus avec l'ORA, l'AS, le réseau Action R6, mais aussi avec le Front national créé par le Parti communiste en mai 1941 et avec les FTPF.

A la fin de l'hiver 1943-1944, une réunion secrète à laquelle participe le chef d'escadron Robelin aboutit au principe d'une action commune de la Garde et des FTP contre la Milice et la Gestapo de Vichy.

Une douzaine d'escadrons sont prévus au départ pour ces opérations. Par la suite, tous les escadrons recevront l'ordre de passer au maquis,

- projet dont n'avaient connaissance que de rares officiers dépendant du chef d'escadron Robelin (en fonction à la sous-direction technique de la Garde depuis avril 1943). Promu Lieutenant-colonel au début de 1944, son projet reste inchangé, malgré les difficultés rencontrées.

A Londres en effet, le BCRA juge son action trop voyante, au risque de faire du tort à la Résistance. Robelin poursuit sur sa lancée, jouant toujours double jeu. Cette attitude déplaît au BCRA, qui souhaite alors qu'il démissionne (25 février 1944).

De France pourtant, le réseau Action R6 et l'ORA soutiennent pleinement Robelin auprès du BCRA, grâce à quoi, il peut continuer la tâche entreprise. Cependant, les autorités le soupçonnent de manque de loyalisme, et jugent la Garde peu fiable.

A l'époque, Robelin pressent le danger, il sait en effet que lui, comme la Garde sont surveillés par la Gestapo et l'Abwehr.

En avril 1944, un rapport du milicien V... à l'encontre de la sous-direction technique et de son chef fait grief à la Garde d'être trop inactive vis-à-vis du maquis ; c'en est au point que Darnand songe un moment à la dissoudre, et d'interner certains de ses officiers.

Le 6 juin 1944, la France apprend le débarquement allié en Normandie. Pourtant, le ralliement de la Garde à la Résistance est remis à plus tard ; cela n'empêche pas la défection de 500 hommes de l'école de Guéret, et de cinq escadrons entre le 5 et le 14 juin 1944.

Le Lieutenant-colonel Robelin tente d'atténuer cet événement, sans apaiser pour autant la méfiance et la curiosité des forces de l'ordre de Darnand. Puis les événements se précipitent.

Le 27 juin 1944, deux résistants transportant des cisailles et un révolver sont interpellés et livrés au SiPo de Clermont-Ferrand. Torturés, ils donnent des noms, qui conduisent à l'arrestation le 2 juillet 1944 de Pyramide, le DMR Courson de la Villeneuve.

Au total, une quarantaine d'arrestations ont lieu ; le contact avec le Lieutenant-colonel Robelin est révélé. Le SiPo-SD de Clermont-Ferrand, bien renseigné, monte un guet-apens pour arrêter le Lieutenant-colonel Robelin.

Celui-ci est convoqué à Vichy avec le Général Perré, à l'hôtel Thermal : là, le Lieutenant-colonel Robelin est aussitôt arrêté par deux policiers allemands puis la rafle commence, visant le Commandant Tharaux, les chefs d'escadron Comemale, Delmas du SSM , Lacroix, les Capitaines Garraud, Puthoste, Grange, ainsi que deux employés civils, M. Dautun, rédacteur à la sous-direction administrative, et M. Lévy, secrétaire civil du cabinet du directeur ; en tant que juif, M. Lévy mourra quelques semaines après, torturé par ses bourreaux, le foie éclaté.

En outre, sont arrêtés deux officiers de la garde personnelle du Maréchal Pétain, le Chef d'Escadron Hurtrel et le Lieutenant Bertrand ; le Capitaine Dupont, qui commande l'escadron 6/4 déplacé à Vichy, subit le même sort, ainsi que le Chef d'Escadron Bouchardon.

En définitive, ont été arrêtés à Vichy « douze officiers dont la relation avec l'armée secrète ont été prouvées », parmi eux des officiers de la Garde ; à Clermont-Ferrand, ce sont « trente suspects dont un commandant qui... était en relation avec Londres... »

Sans le groupe Robelin, la Garde ne saura se dresser en bloc contre l'occupant. Isolément en effet, un régiment qui passerait au maquis aurait provoqué le désarmement des cinq autres. En conséquence, le projet initial élaboré avec l'ORA ne sera jamais concrétisé, pas plus que celui imaginé avec les FTP, sur Vichy.

Le 7 juillet 1944 tous les officiers se trouvent à Vichy au siège de la Gestapo. Quant au Lieutenant-colonel Robelin, au Commandant Jeandel, et au Capitaine Morand, ils sont déjà internés depuis le 6 juillet. Le 9 juillet 1944, les internés sont conduits à Clermont-Ferrand. Les conditions d'hygiène et la nourriture sont déplorables.

Parmi les personnalités présentes, figurent Mgr Gabriel Piguet, Évêque de Clermont-Ferrand, et le Prince Xavier de Bourbon-Parme. Les aveux des internés sont obtenus de diverses façons, tant par la guerre des nerfs que par la torture.

Interrogé à Chamalières le 15 juillet 1944, le Commandant Tharaux est ramené le soir même au 92e RI, où il retrouve le Capitaine Grange ; ils n'ont aucune nouvelle du Capitaine Morand, au secret depuis son arrestation. Le 24 juillet 1944, l'un des dirigeants du Front national, Serge Fischer, doit aider au transport du Lieutenant-colonel Robelin, avec l'aide de Courson de la Villeneuve. Il gît sur une civière ; il a un trou de la grosseur d'un poing dans la fesse droite. Sa jambe droite a au moins quatre à cinq fois la taille normale. Il a des blessures moindres un peu partout.

Le Lieutenant-colonel Robelin a été tabassé à un point tel qu'il ne peut plus tenir debout. La Gestapo a frappé sur sa jambe avec une bouteille vide.

Le 27 juillet 1944, les interrogatoires de la Gestapo reprennent pour le Chef d'Escadron Bouchardon, pour le Commandant Tharaux, et pour le Lieutenant-colonel Robelin pour la quatrième fois au moins : celui-ci a été transféré quelques jours avant à Vichy ; tous trois y sont torturés.

Le 28 juillet 1944, le Lieutenant-colonel Robelin a subi son dernier interrogatoire ; le 28 ou le 29 juillet, le Capitaine Grange a pu lui parler à l'insu de ses gardiens. Il est « en très mauvais état, se tenant difficilement debout, le visage assez peu reconnaissable. Il me dit qu'il est " foutu " compte tenu de ses blessures sur tout le corps. Il précise qu'à une hanche l'os est apparent... Puis, n'en pouvant plus, il demande au Capitaine Grange d'appeler l'infirmier.

Une heure après, la Gestapo arrive au 92e RI, et emmène le Lieutenant-colonel Robelin. Depuis, on ne l'a plus revu ». Il aurait été conduit à Vichy.

Après la libération, on ne retrouva pas le corps du Lieutenant-colonel Robelin. Les services du Colonel Paillole ont déterminé qu'il fut assassiné par le SS d'origine roumaine Schlimmer, du KDS de Vichy. Il l'aurait étranglé dans sa cellule.

Pour le Capitaine Garraud, « son état de santé laissait prévoir une fin prochaine dès le 9 août », date à laquelle il est dans les locaux de la Gestapo de Vichy. Atteint de gangrène à la cuisse droite, il est soigné par les Allemands avec des ampoules de 10cc de sérum. Le même jour, il quitta sa cellule sur un brancard pour être confié à un hôpital de Vichy, - aux dires des policiers -. Pour son voisin de cellule, Henri Jeanjean, Inspecteur de Police à Thiers, le Lieutenant-colonel Robelin « expire le 10 août 1944 vers 11 heures ». Il l'a vu au préalable, avec des plaies « dans lesquelles on pouvait passer le poing ».

Début août 1944, la Gestapo, pour se disculper, aurait tenté de faire croire à un transfèrement de cet officier vers une destination inconnue.

 

 

 

 
Haut de page
 

 

Article paru dans le Bulletin N° 186

Dépot légal - Copyright

Enregistrer pour lecture hors connexion.

Toute exploitation, de toute nature, sans accords préalables, pourra faire l'objet de poursuites.

Lire l'Article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle. - Code non exclusif des autres Droits et dispositions légales....