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Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale ( France ) - www.aassdn.org -  
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PAGES D'HISTOIRE & " Sacrée vérité " - (sommaire)
ANNIVERSAIRES ET COMMÉMORATIONS
 

Allocution du Colonel Paul PAILLOLE

RAMATUELLE - 8 Mai 1999 - JOURNÉE DU SOUVENIR - 40e anniversaire de l'inauguration de notre Mémorial national  

" Les raisons pour faire de ce 8 mai une manifestation d'une ampleur exceptionnelle ne sont pas en réalité les motivations essentielles de ma présence. La vérité, c'est que j'ai succombé à trois tentations : la première est celle de me retrouver au pied du Mémorial, face à mon destin, face aux noms de ces camarades dont je revois les visages et dont je n'oublie pas le sacrifice.

Que représente mon époque ? Que représente mon époque, en face de cette vieille dame qui, un jour de Toussaint, remontait à pied depuis Saint-Tropez pour venir poser quelques chrysanthèmes sur la tombe spirituelle de son fils, le Lieutenant de Vaisseau Lavallée ?

La deuxième motivation est de partager avec vous toutes les joies et les émotions de notre rencontre. Aux Anciens, qui avez vécu avec moi tout ou partie de nos missions de renseignement et de sécurité, aux Jeunes qui nous avez rejoints et nous aidez à maintenir le flambeau du souvenir, à tous, je dis ma reconnaissance d'être aujourd'hui à côté de moi.

Mon cher Rigaud, lève-toi, nous sommes désormais les derniers survivants de cette journée du 1er juillet 1940 où nous avons lancé cette aventure qui consistait à créer le premier réseau clandestin de l'armée. Je suis heureux que tu sois là pour en témoigner. 1941 a été pour nous deux l'année des premiers résultats de nos travaux, de nos efforts contre l'ennemi dans la France occupée. Ce furent aussi les premières épreuves pour nous, les premiers camarades arrêtés, certains déportés, d'autres assassinés ; d'autres ont malheureusement suivi d'autres destinations. Et puis 1942 est arrivé, nous apportant une lueur d'espoir : c'est Giraud qui s'évade de Königstein et qui vient en Afrique du Nord prendre le commandement de l'Armée française et la remettre au combat. Jamais on ne dira assez la reconnaissance de la nation pour ce grand soldat dont, jamais, on n'honorera suffisamment la mémoire. Et la famille Giraud - je dis cela en présence de sa fille - dont la soeur est morte en déportation ! Quel courage dans l'abnégation ! 1943: c'est un tournant dans l'histoire de nos réseaux. C'est Michel Thoraval - lève-toi, Michel - qui est parachuté de Londres et qui apporte à nos réseaux les moyens matériels et moraux pour continuer notre travail.

C'est, en Méditerranée, les premières opérations sous-marines avec Achille Ottou - lève-toi, Achille! - opérations effectuées grâce au dévouement de passeurs comme Achille Ottou, sa soeur, sa mère ! Et en septembre 1943 c'est l'évasion de l'étendard du 21e Dragons, porté par Lacheroy, porté par de Neuchèze, enroulé autour de sa poitrine, et qui rejoint Alger. Dans le même sous-marin, en septembre 1943, s'évade également de France pour représenter l'ORA, ceci pour les Saint-Cyriens qui sont dans cette salle, l'oncle de leur patron le Colonel Henri Zeller qui rejoint le Général Giraud et va prendre les consignes pour organiser l'armée de l'armistice.

Voilà 1943 qui me donne tant de satisfaction de ce point de vue. Mais, hélas, en novembre c'est le coup dur. C'est cette interruption de nos liaisons par un commando allemand qui attaque nos camarades. Alsfasser se défend : il est tué sur place. Monique Giraud qui était à ses côtés et devait prendre place dans le sous-marin parvient à s'évader - Monique, lèves-toi ! - Elle rejoindra par l'Espagne tandis que Ramatuelle recueille la dépouille d'Alsfasser qui est représenté dans cette salle par Fontès, lève-toi ! –  

Et avec le groupe Fontès, avec le groupe Morhange, Alsfasser a accompli la mission de sacrifice que je lui avais confiée. Malheureusement il en est mort.  

Et nous arrivons en 1944 qui représente pour nous la consécration de tous nos efforts puisque nous sommes les seuls à avoir été admis dans les " war-rooms " à Londres, pour négocier avec le Général Eisenhower et ses Services les conditions dans lesquelles nos Services participeraient aux opérations de débarquement et de libération du territoire. Cette marque de confiance, que beaucoup ignorent, fut pourtant pour moi et pour mes camarades la consécration de quatre années d'effort et de sacrifice.

Et puis c'est 1945, c'est la Victoire avec tout le travail pour éliminer le poison nazi, avec les Gerar-Dubot, les Dumont, avec tous ces camarades qui ont tant fait pour redresser le prestige de nos Armées. Et Sérot, Sérot assassiné en 1948 à Jérusalem aux côtés du Comte Folke Bernadotte, représentant des Nations Unies ; Sérot le représentant le plus emblématique de nos services, qui fut mon adjoint à Alger et l'ami de Chantal Lacheroy - où est-elle Chantal ? - Sérot assassiné ! Nous n'avons pas pu supporter cette peine et de là est née l'idée de créer cette association qui s'appelle aujourd'hui Association des Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale. C'est au lendemain de la mort de Sérot que nous avons déposé ses statuts et que nous avons voulu immortaliser dans ce pays, à l'abri des foules, à l'abri du bruit, tout ce que je viens de résumer trop brièvement.  

C'est le Mémorial, dont l'idée m'est venue au lendemain d'une bouillabaisse concoctée par Achille Ottou en 1954. Il a fallu cinq ans pour mettre au point et réaliser cette idée mais, avec votre prédécesseur, Monsieur le Maire, nous avons pu assister en 1959 à l'inauguration de ce mémorial.

La troisième tentation qui m'a amené ici aujourd'hui, c'est celle de me retrouver dans cette commune que j'aime tant. Je parcourais en 1945 et 1946 les plages désertes remplies de ronces, des séquelles des épreuves du débarquement, et j'ai admiré l'emprise de vos municipalités successives et celle, décisive, de Gustave Etienne et de la vôtre mon cher Albert. J'ai admiré l'évolution de ce village devenu célèbre dans l'Europe entière. Ce village qui a fait de moi un Citoyen d'honneur, je l'aime parce que j'y sens la chaleur, je m'y trouve chez moi, j'y suis bien, certainement comme vous tous. On est bien à Ramatuelle. Et, voyez-vous, Monsieur le Maire, c'est là l'un de vos exploits d'avoir fait de votre commune un modèle, de lui avoir donné un prestige inégalable. Vous l'avez dotée de réalisations à la pointe du progrès et qui montrent à quel point vous êtes soucieux du bien-être de vos administrés. Cette commune qui a tellement évolué, vous lui avez quand même conservé son visage et cette beauté des lieux inégalable que l'on observe depuis le mémorial. Et les camarades dont les noms sont inscrits au mémorial peuvent voir, dans le lointain, l'endroit où avaient lieu les débarquements, où se faisait ce travail de liaisons clandestines entre la métropole et l'Afrique du Nord.  

Voilà ce que je voulais vous dire. Je voudrais ajouter quelques mots à l'adresse de mes jeunes bazars de la 21e compagnie du Bataillon de Saint-Cyr qui, avec leur chef nous ont fait l'honneur et la joie de se joindre à nous, de représenter ici leur époque et le Général Zeller, et je les en remercie. Je voudrais qu'ils conservent le souvenir de ce mémorial et de ce beau village.

 

Napoléon disait... Griffi ! toi qui fus l'un des libérateurs de la Corse et qui débarquas, fin 42, avec un commando pour que les Corses puissent se libérer eux-mêmes, - je parle de Napoléon ! - Napoléon, ton compatriote qui, en 1805, a donné à l'École le mot qui signifie tout ce qu'elle représente : " Ils s'instruisent pour vaincre ! ". Devise au sens profond, au sens évolutif et très actuel, quand on imagine ce que font vos camarades aujourd'hui au plan humain, au plan social, car c'est cela aussi que l'on vous apprend maintenant.

 

Alors je le répète, je souhaite que vous conserviez le souvenir de ce beau village et de ce Mémorial. Ils entretiennent le souvenir de vos grands Anciens qui, en 1940, ont su vaincre l'humiliation de la défaite, le désordre, la peur. Associés à une élite patriotique, du plus grand au plus modeste des Français, ils ont tout risqué, y compris leur vie, pour rendre à l'Armée française et à la France leur honneur et leur dignité.

J'ai terminé ".

 

 

 

 
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Article paru dans le Bulletin N° 183

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