| Par   le colonel  	Michel GARDER  Dans sa remarquable préface de l’opuscule " Afghanistan   	- dix années   	terribles 1977-1987 ", le   	professeur Alexandre Benigsen envisage, fin 1987, les différentes  	« options politiques » qui permettraient à Moscou de se tirer du guêpier   	afghan.   	   	Selon lui, ces options seraient au nombre de quatre   	— passer la main aux communistes afghans, leur confiant le soin de   	poursuivre la révolution et d’éliminer la résistance;   	— la politique de « réconciliation nationale » aboutissant à un front commun   	avec les libéraux progressistes. Ce serait alors « un schéma léniniste   	classique », celui du « pas en arrière » et la « main tendue à la   	bourgeoisie nationale »   	— l’évacuation pure et simple des troupes soviétiques;   	— isoler la Résistance de ses bases arrières en Pakistan et en Iran et   	ensuite déstabiliser le Pakistan.  Les deux premières options n’étant pas jouables et la troisième paraissant   	inimaginable, Alexandre Benigsen avance la quatrième, tout en soulignant que   	le temps ne travaille pas pour Moscou.  Il reste néanmoins, selon le professeur, une cinquième option : proclamer   	que l’invasion de 1979 fut une tragique erreur politique, téléguidée par des   	ennemis de l’U.R.S.S. et dont Brejnev fut le grand responsable.   « Une telle solution (conclut Alexandre Benigsen) n’est pas un rêve, mais   	elle n’est malheureusement pas pour demain. »   	Or il se trouve que nous nous acheminions sur un compromis entre la   	troisième et la quatrième option, à savoir que le Kremlin a décidé de   	retirer ses troupes tout en faisant peser sur le Pakistan la menace de la   	déstabilisation par extension d’une fort probable guerre civile afghane.  Depuis la déclaration de Mikhaïl Gorbatchev du 8 février 1988, la presse   	soviétique a entonné en quelque sorte le « Chant du départ » en expliquant   	que les troupes engagées en Afghanistan allaient être rapatriées avec le «   	sentiment du devoir accompli » sans qu’il y ait de vainqueur ou de vaincu.   	Du jour au lendemain l’intervention « fraternelle » de la 40em Armée en vue   	d’aider le « gouvernement légal » afghan dans sa lutte contre des « bandits   	» armés par les Etats-Unis et la Chine, se muait en « conflit régional » du   	genre de la « guerre du Golfe ». L’U.R.S.S. soucieuse de montrer l’exemple   	se retirait de ce conflit en laissant aux Afghans eux-mêmes le soin de   	régler leur propre destin.  Toutefois, en exigeant au préalable un accord entre le Pakistan et le «   	gouvernement d’Union Nationale » créé de toutes pièces à Kaboul par leur   	protégé Najibullah, Moscou jouait délibérément la carte du « chaos » en   	Afghanistan et de la menace de déstabilisation de l’Etat pakistanais.  A première vue une telle manœuvre pourrait paraître très habile. En fait il   	s’agissait beaucoup plus d’un coup de poker que d’une combinaison d’échecs   	avec non seulement des conséquences graves pour l’Afghanistan — et   	éventuellement le Pakistan, mais également une menace à terme pour l’empire   	soviétique.   	Déstabilisation du Pakistan, bain de sang en Afghanistan, répercussions en   	chaîne dans les républiques islamiques de l’U.R.S.S. constituent la trame   	d’un avenir catastrophique difficilement contrôlable.   	On peut espérer néanmoins que la Résistance afghane saura s’unir ; que le   	gouvernement pakistanais maintiendra l’ordre chez lui et que les Soviétiques   	se retireront sans trop de remous. Entre ces deux visions pessimiste et   	optimiste les variantes ne manquent pas.  En conclusion une chose est certaine l’U.R.S.S. a perdu la guerre et l’a   	déjà reconnu.       |