Par le Colonel Paul PAILLOLE

Dans mon message de janvier 1998, je laissais entendre que l'année 1998 devait constituer une étape décisive pour la continuité de notre amicale. Qu'en est-il fin 1998 ?

Certes le recrutement compense largement les vides douloureux qu'impose l'inexorable loi du temps. Sujet de satisfaction que je souhaiterais plus soutenu en 1999, d'autant plus que, comme beaucoup de nos camarades je ressens péniblement un relâchement général du Devoir de Mémoire.  

Vous avez été nombreux à m'écrire votre déception en constatant le mutisme des media et les absences de nos dirigeants civils et militaires, aux manifestations du souvenir. Il n'y a pas si longtemps (1993 en Corse, 1994 en Normandie et en Provence, 1995 dans toute la France), les événements qui ont marqué notre délivrance et la victoire sur les nazis, faisaient l'objet de déclarations exaltantes et de serments solennels de fidélité. Qu'en est-il de ces engagements sacrés ?

L'Armée, le coeur serré, a d'autres problèmes.

L'Éducation nationale s'engage dans le civisme, sans pénétrer dans la Défense et le patriotisme.  

Les rares participations officielles aux cérémonies qui ont suivi un onze novembre de tradition, ont moins évoqué l'héroïsme stupéfiant de nos aînés que les douloureuses mutineries de 1917.  

Et un Allemand chargé d'une mission électorale dans notre pays, nous convie à passer l'éponge sur les dossiers des porteurs de valises...  

Dans ce dévergondage moral et national, nos associations d'anciens combattants et résistants ont de plus en plus une impression de solitude tandis que certaines programment avec tristesse la fin de leur mandat avec la fin de ce siècle.

L'A.A.S.S.D.N. surmontera ces épreuves par la jeunesse et le renouvellement de son recrutement, par son inébranlable respect pour son passé et par ses ambitions pour l'avenir du Renseignement.  

Aux " anciens " de nos maisons j'assure comme l'a fait magistralement François Goetz qu'il n'y a pas d'antinomie entre le devoir de réserve et celui de mémoire. Aux "nouveaux" qui viennent à nous, parce que la Vérité sur l'Histoire des Services Spéciaux commence à s'imposer et que nos ambitions d'avenir répondent à leurs voeux, j'affirme que l'A.A.S.S.D.N. version XXIe siècle, assise sur le socle de traditions et de passé prestigieux, sera l'un des artisans fondamentaux de la culture du Renseignement et de la Défense... S'ils veulent bien lui consacrer leur énergie patriotique et leur ambition de servir. A eux nos statuts ouvrent leurs portes. A nous, à vous, de les rechercher et de les accueillir.  

Je veux conclure ce propos par une image lumineuse qui en concrétise les fondements ; pleins d'espoir pour l'avenir... Dans ces écoles de Coëtquidan où se forme l'élite de notre armée, un séminaire d'Histoire animé par le professeur Forcade oriente les jeunes sous-lieutenants Saint-Cyriens vers la recherche de la vérité, sur l'action des Services Spéciaux militaires et plus généralement sur l'oeuvre de Renseignement. L'enthousiasme qu'il suscite, les travaux qu'il soutient avec notre concours, l'intérêt qu'il provoque dans les milieux universitaires, tout nous prouve que depuis quelques années une large brèche s'ouvre dans le mur de l'ignorance et qu'une voie magistrale s'offre à notre politique de Défense.  

Pourquoi ne fonceriez-vous pas avec nous dans cette brèche ? C'est le meilleur cadeau que vous puissiez nous faire au seuil de la nouvelle année. C'est le voeu le plus ardent que je forme pour notre association.